Mario Draghi, président de la BCE a abattu sa dernière carte pour sauver l'Euro |
Avant d'analyser les deux évènements marquants de la semaine, petit tour d'horizon des trois tendances qui marquent l'économie en ce début d'année 2015.
- La chute de l'euro: nous sommes désormais à 1 euro pour $1,12 alors que la monnaie européenne était encore à $1,40 il y a 6 mois.
Cela s'explique principalement par la hausse du dollar due à l'amélioration de la situation économique aux Etats-Unis avec un chômage qui baisse (5,9%) et une croissance qui repart, bien aidée par les Gaz de Schiste. Avec une situation économique morose en Zone Euro, on parle donc plutôt d'une hausse du dollar face à un euro faible.
La prochaine remontée des taux directeurs par la FED aux Etats-Unis attire les investisseurs qui l'anticipant préfèrent désormais acheter un dollar plus rémunérateur.
L'effet immédiat est positif pour la Zone Euro puisque nos produits deviennent plus compétitifs et les exportations augmentent mécaniquement. Même si les importations deviennent plus chères, au détriment de l'Allemagne par exemple, l'impact global est positif.
Certains parlent déjà d'une parité parfaite de l'euro/dollar pour 2015: les spéculations sont lancées !
- La baisse du pétrole: le pétrole continue sa baisse et est passé sous la barre des $50: cela constitue bien sûr une bonne nouvelle pour nous, importateurs. Cependant, certains souffrent de cette situation: les pays exportateurs mais aussi Total pour qui une chute de 10 dollars du prix du brent représente un manque à gagner annuel de 2 milliards de dollars.
Retrouvez mon dernier article à ce propos.
- La baisse des taux directeurs: les taux d'emprunts auxquels les pays financent leurs dettes via des emprunts ont également atteint des plus bas historiques. Les taux d'emprunt à 10 ans qui servent de référence sont par exemple à 0,55% en France; l'Allemagne emprunte elle à des taux négatifs à 2 et 5 ans. L'Italie (1,59%) et l'Espagne (1,35%) empruntent même moins cher que les Etats-Unis (1,78%) à 10 ans: incroyable !
Un plan massif de la BCE
Le premier évènement de la semaine s'est déroulé ce jeudi à Francfort, au siège de la Banque Centrale Européenne où son président Mario Draghi tenait une conférence de presse…très attendue !
En effet, ce dernier a annoncé le lancement d'un plan massif de rachat d'actifs, ce que l'on appelle communément "QE" ou "Quantitative Easing".
Concrètement, la BCE va injecter un montant hallucinant de 1140 milliards d'euros dans l'économie européenne (60 milliards mensuels pendant 19 mois) à l'instar de ce qu'avaient pu faire la FED aux Etats-Unis, la Banque d'Angleterre ou la Banque du Japon il y a quelques années pour des résultats mitigés.
L'objectif principal de la BCE est de combattre la baisse des prix (-0,2% en Décembre) pour revenir à une inflation proche de 2% (telle qu'elle est prévue dans le mandat de la BCE) et de relancer une économie atone.
Pour cela, elle va racheter des dettes d'Etats sur les marchés secondaires (n'ayant pas le droit de les financer directement) afin d'orienter les investisseurs et les capitaux vers l'économie réelle ce qui permettra un redémarrage de la zone euro par l'investissement.
La masse monétaire (argent qui circule dans l'économie) augmentant, l'Euro perd donc de sa valeur par rapport au dollar: il a subi ce jour-ci sa plus grosse chute en 24h depuis sa création (-4%).
Si le 22 Janvier 2015 fera donc date dans l'histoire, les conséquences sont elles plus incertaines et c'est bien dans l'inconnue la plus totale que ce plan a été lancé.
Conjugué aux trois tendances développées plus haut, le risque de ce plan est de désinciter les Etats (la France par exemple) à se réformer puisque ils se financent encore plus facilement désormais.
Avec des taux et une inflation faibles, le "quantitative easing" est donc la dernière carte que peut abattre Mario Draghi: pas sûr qu'elle soit de nature à rassurer sur l'état réel de la zone euro.
Mais comme il l'a répété, c'est maintenant au tour des Etats et des agents économiques de jouer le jeu.
Elections en Grèce
L'autre évènement majeur de la semaine arrive demain avec des élections législatives qui s'annoncent décisives en Grèce: le parti radical de gauche Syriza emmené par Alexis Tsipras arrive en effet en tête des intentions de vote (32,5% selon une enquête récente).
Si ce parti radical arrivait en tête, il devrait probablement s'allier avec d'autres partis pour pouvoir gouverner. Contrairement à ce que l'on peut entendre, Syriza ne souhaite pas sortir de l'euro mais changer radicalement de cap en renégociant "fermement" la dette de la Grèce.
L'enjeu ? La dette publique Grecque s'élève à 320 milliards d'euros soit plus de 177% du PIB (95,2% en France): mais surtout, 85% de cette dette est détenue par des Etats et par la Troïka (FMI de la BCE et de l'UE). Un défaut de paiement de la Grèce sur sa dette représenterait un coût de 40 milliards d'euros pour la France, soit 615 euros par français !
Si ce scénario catastrophe n'est pour l'instant par privilégié, une renégociation de la dette aura probablement lieu. Pour être complet sur la Grèce, il faut noter que la situation économique s'améliore avec avec une hausse du PIB de 0,6% en 2014 (après 6 années de récession) et une prévision de 3% pour 2015.
La question est: ira-t-on jusqu'à ce qu'on appelle le "Grexit" ? L'Europe sera vite fixée.
A plusieurs niveaux, ce mois de janvier est donc dors et déjà historique du point de vue économique. Baisse de l'euro, du pétrole, taux d'emprunts bas, liquidité abondante: tous les carburants sont là.
Si l'Europe ne repart pas, ce ne sera pas un problème de carburant mais bien un problème de moteur.
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